Caractère obligatoire d’un régime complémentaire frais de santé et article 11 de la loi Évin

26/02/21

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Lorsqu’un régime collectif frais de santé ou prévoyance à affiliation obligatoire est mis en place par voie de décision unilatérale de l’employeur (DUE), les salariés déjà employés dans l’entreprise à cette date ne peuvent être contraints d’y adhérer. Cependant, le refus du salarié usant de son droit de dispense au titre de l’article 11 de la loi Évin doit être formulé par écrit…

Cass. 2ème Civ., 24 septembre 2020, n° 19-13.195

Rappel

En application de l’article 11 de la loi Évin, lorsqu’un régime collectif frais de santé ou prévoyance à affiliation obligatoire est mis en place par voie de décision unilatérale de l’employeur (DUE), les salariés déjà employés dans l’entreprise à cette date ne peuvent être contraints d’y adhérer.

Faits

En 2008, une entreprise a instauré, par DUE, un régime frais de santé à affiliation obligatoire faisant suite à un régime facultatif mis en place quelques années auparavant. Deux salariées qui avaient refusé d’adhérer au précédent régime facultatif, n’ont pas été affiliées au régime obligatoire lui ayant succédé.

Ces deux salariées étaient bien présentes à la date de mise en place du régime obligatoire, mais l’employeur n’avait pas recueilli leur refus d’adhésion écrit à cette occasion.

Lors d’un contrôle, l’Urssaf a réintégré la totalité des contributions de l’employeur finançant le régime dans l’assiette des cotisations de Sécurité sociale, au titre des années 2010 à 2012, au motif que le régime frais de santé mis en place en 2008 était dépourvu de caractère obligatoire. Pour mémoire, les dispositions relatives à la modulation des redressements de cotisations, entrées en vigueur le 1er janvier 2016, n’étaient pas encore applicables.

Décision de la Cour de cassation

La Cour a confirmé le bien fondé de ce redressement, au motif que le régime ne présentait pas un caractère obligatoire, dès lors que l’entreprise n’établissait pas, par les attestations remises au dossier, que les salariées auraient refusé volontairement d’adhérer au régime complémentaire obligatoire lors de sa mise en place ou de leur embauche. L’entreprise ne justifiait pas non plus, par ses productions, de la persistance du refus d’adhésion de ces mêmes salariées lors de la mise en place ultérieure du régime obligatoire.

À noter

À la date de mise en place du régime objet du litige, l’exigence d’un écrit pour justifier des dispenses s’appuyait uniquement sur la circulaire n° DSS/5B/2009/32 du 30 janvier 2009. La société avait ainsi soutenu qu’« aucun formalisme légal ou réglementaire n’imposait jusqu’au 11 janvier 2012, pour justifier du caractère obligatoire du régime, la production par l’employeur d’une demande de dispense des salariés concernés ayant refusé d’adhérer. », mais la Cour de Cassation ne l’a pas suivie dans cette analyse.

Quoi qu’il en soit, l’exigence de production d’une demande de dispense des salariés concernés est désormais expressément prévue à l’article R. 242-1-6 du code de la Sécurité sociale, qui dispose que l’employeur doit être en mesure de la produire « dans tous les cas ».

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Cet arrêt met en lumière l’importance, pour l’employeur, d’apporter la preuve du refus d’adhésion des salariés présents avant la mise en place par DUE d’un régime collectif obligatoire, afin de sécuriser le bénéfice du traitement social de faveur applicable à son financement patronal. Ce refus doit être réitéré dans le cas où des salariés ont précédemment refusé l’adhésion à un régime facultatif antérieur.